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Date : 19-12-2024 13:04:33
Gisèle Pélicot devant le tribunal d'Avignon, le 16 décembre.
Gisèle Pélicot à son arrivée au tribunal d'Avignon pour l'énoncé du verdict, le 19 décembre. © Clément Mahoudeau / AFP
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Clément Mathieu, avec AFP 19/12/2024 à 09:55, Mis à jour le 19/12/2024 à 12:32
Dominique Pelicot, accusé d’avoir drogué pendant une décennie son épouse Gisèle pour la violer et la faire violer par des dizaines d’inconnus a été reconnu coupable et condamné à 20 ans de prison. Les 50 autres prévenus ont tous été reconnus coupables, mais les peines varient.
Un procès hors norme, un verdict historique, et la justice pour Gisèle Pelicot. Après quatre mois d’audience et trois jours de délibéré, les cinq magistrats de la cour criminelle ont annoncé ce jeudi matin le sort réservé aux 51 accusés du procès des viols de Mazan : tous coupables.
Le principal accusé, Dominique Pelicot, 72 ans, qui a reconnu avoir drogué pendant une décennie son épouse Gisèle aux anxiolytiques pour la violer et la livrer à des dizaines d’inconnus qu’il recrutait sur internet, a été déclaré coupable de l’ensemble des faits reprochés, dont les captations d’images impudiques de sa fille Caroline. Dominique Pelicot a écopé de la peine maximale possible pour viols aggravés, soit 20 ans de réclusion criminelle, avec une période de sûreté des deux tiers, suivant ainsi la demande de l'accusation dans son réquisitoire fin novembre.
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Les 50 autres prévenus, ces hommes âgés de 27 à 74 ans, de tous milieux sociaux, accusés d’avoir agressé sexuellement Gisèle Pelicot alors qu’elle était inconsciente, ont tous été reconnus coupables. Les condamnations vont de trois ans d'emprisonnement dont deux avec sursis à 13 ans de réclusion. Les peines prononcées, toutefois, sont généralement en dessous des réquisitions. Un seul accusé sortira libre, sa peine étant déjà couverte par la détention provisoire.
Gisèle est arrivée sous les applaudissements de la foule
Les trois enfants du couple, David, Caroline et Florian, sont arrivés ensemble au tribunal vers 08h30, fendant une foule de spectateurs, militants et journalistes. Sous les applaudissements de la foule et au son du chant « Debout les femmes », leur mère Gisèle est, elle, arrivée séparément et souriante un peu après 9H00 accompagnée de ses deux avocats. À l’extérieur du tribunal, des collectifs féministes étaient venus apporter leur soutien à Gisèle Pelicot et fustiger « la culture du viol ».
La tension était palpable au sein même de la salle d’audience du palais de justice d’Avignon, où un important dispositif policier est prévu dans le cas où la cour annoncerait des mandats de dépôt contre les 32 accusés ayant comparu libres. Pour leur faire de la place, seuls quatre médias sur les près de 180 accrédités, dont 86 étrangers, pouvaient assister à la lecture du verdict dans la salle d’audience principale. Les autres journalistes l’ont écouté depuis plusieurs salles annexes.
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Des réquisitions pour des peines exemplaires
Le ministère public avait réclamé de 10 à 18 ans de réclusion contre 49 d’entre eux, jugés pour viols aggravés, et quatre ans de prison contre le dernier, seulement poursuivi pour « attouchements » sur Gisèle Pelicot. Ces réquisitions sont plus sévères que la moyenne des condamnations pour viols en France, qui était de 11,1 ans en 2022, selon le ministère de la Justice.
Laure Chabaud, l’une des deux représentantes du ministère public, avait espéré que la décision de la cour dépasse le sort de ces accusés et envoie « un message d’espoir aux victimes de violences sexuelles ». Ce verdict devra constituer un guide « dans l’éducation de nos fils, car c’est par l’éducation que s’impulsera le changement » pour « une prise de conscience collective, sociétale », avait-elle insisté.
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À l’inverse, les avocats de la défense avaient formulé une trentaine de demandes d’acquittement pour leurs clients qui, selon eux, ont été « manipulés » par le « monstre », le « loup » ou encore « l’ogre » Dominique Pelicot. Ils « n’avaient pas l’intention » de violer son ex-épouse, âgée aujourd’hui de 72 ans, et n’ont dès lors pas commis de crime au sens du code pénal, ont-ils plaidé.
Procès hors normes
Hors norme par sa durée, le nombre d’accusés, mais surtout l’atrocité des faits reprochés, ce procès a déjà marqué l’histoire. Dans les rangs des associations féministes et des parties civiles, l’espoir est grand de le voir faire évoluer les mentalités sur les viols, tentatives de viols et agressions sexuelles déclarés chaque année par plus de 200.000 femmes en France.
Cette affaire aura également permis d’incarner le fléau des victimes d’agressions sexuelles, notamment par l’usage de la soumission chimique, à travers la figure de Gisèle Pelicot, qui de victime anonyme s’est muée au fil des semaines en une icône féministe exhortant les femmes « à ne plus se taire » afin que « la honte change de camp ».
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